The Inn at Lambton, 16 mai 2014
Voici une présentation succincte des recueils de nouvelles Félicité et La Garden-Party. Je les ai beaucoup apprécié même si, comme au sujet de l’auteur lui-même, je ne prétendrai pas en avoir tout bien saisi.
Et peut-être est-ce naturel comme un des grands thèmes, sinon le principal, de Katherine Mansfield est l’incertitude, l'incertitude à l’égard de ses émotions, des gens, des choses.
Ainsi, dans Félicité, après avoir arrangé la décoration de sa maison, Bertha Young est envahie par un sentiment de plénitude qui sera détrompé quelques heures seulement plus tard de façon ironique et cruelle.
De la même façon, plusieurs autres nouvelles, telle Monsieur et Madame Colombe, mettent en scène un jeu d'élan et de fuite à l’égard du monde et des autres qui semble ne pouvoir jamais se résoudre par un accord, une harmonie, de manière satisfaisante.
Parfois, les illusions ou la tromperie sont plus franchement marquées, surtout me semble-t-il quand il s'agit de femmes pauvres et esseulées s'offrant en proies faciles (La Petite institutrice, Miss Brill...)
Sans nul doute, si les écueils dissimulés constituent un des grands thèmes de Katherine Mansfield, c'est qu'elle-même souffrit souvent de leur rencontre au point que c'est dans un sentiment de naufrage, de déprise complète avec le monde, sous les coups conjugués de la mort de son frère, de la tuberculose et de la solitude, qu'elle en vint à chercher refuge dans la « recollection » (entendez-le en anglais) de ses souvenirs d'enfance et d'adolescence.
Ces nouvelles, dont les plus remarquables sont Prélude et Sur la baie, égrènent les recueils de Katherine Mansfield à la façon d'une feuilleton décousue. Elles recèlent assurément un charme profond à la fois émotionnel et visuel qui vous donne l'impression d'être là, en Nouvelle-Zélande, il y a longtemps. La description de la montée d'un troupeau de moutons qui ouvre Prélude vous entraîne doucement à leur suite dans la découverte de l'univers lointain de Kezia et de sa famille sous une lumière éclatante et douce à la fois.
Toutefois, dans ces tableaux impressionnistes apaisants, les ombres trouvent encore où apparaître sous la forme de l'insatisfaction ou de la frustration qui rongent certains personnages comme la touchante Beryl, la parente pauvre de la famille, aux rêves silencieux d’amour et de départ.
Beryl n’est pas la seule à rêver de train et de bateau dans le monde fuyant de Katherine Mansfield, ainsi de Mathilde dans Le Vent souffle ou de l’héroïne amère d’Un pickle à l’aneth. Katherine Mansfield peut donner à cela un tour caustique et sordide pour Miss Moss dans Tableaux ou purement poignant dans Vie de maman Parker où celle-ci cherche en vain un lieu où seulement pleurer en paix.
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