Et son ombre recueille une sélection de textes sur les sœurs Brontë ainsi que sur quelques autres auteurs britanniques. Pratiquement tous proviennent du forum The Inn at Lambton. On peut considérer Et son ombre comme complémentaire au Wanderer of the Moors (site dédié entièrement aux sœurs Brontë) et à Passerelle (sur la littérature britannique en général). Par ailleurs, je tiens à m'excuser de la qualité pas toujours bonne des photographies que je propose de mes voyages en Angleterre, notamment dans le Yorkshire d’où étaient originaires les sœurs Brontë.

Affichage des articles dont le libellé est 08 - Jane Austen. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est 08 - Jane Austen. Afficher tous les articles

...

The Inn at Lambton, 14 mai 2014 

Un éclair, enfin, une averse se met à tomber du ciel... 

MON TOUT PREMIER 
(ET BREF) COMMENTAIRE 
SUR JANE AUSTEN !

Alors que j'avance un peu laborieusement, je l'avoue, dans ma lecture de Raison et sentiments même si je suis sensible au fond de son propos, j'ai envie de faire part de ma prédilection pour Northanger Abbey parmi les romans de Jane Austen que j'ai lu jusqu'à présent. J'ai aimé l'ironie de cette parodie de romans gothiques comme son héroïne en vit un finalement sans le réaliser en tombant dans tous les pièges que réservent les relations humaines ordinaires dont Jane Austen fait ainsi la satire...

La pendule du cœur

SUR RAISON ET SENTIMENTS

The Inn at Lambton, 19 mai 2014 

Pour ma part, j’avoue avoir d’abord langui sur le premier volume un peu fastidieux à mon goût, mais il est vrai que je n’étais pas non plus dans les meilleures dispositions pour entamer la lecture d'un long roman d’analyse. Ainsi, ce n'est qu'à partir du deuxième volume que j'ai commencé à prendre intérêt aux mésaventures sentimentales d’Elinor et de Marianne. J’ai trouvé Jane Austen juste sur la question du sense et de la sensibility qu'elle n'oppose pas, mais désire voir concilier. Le couple Dashwood montre comment le fait de se laisser gouverner par la seule raison peut conduire à la froideur et au calcul tandis que Marianne montre comment se laisser dominer par la passion peut mener à l'égarement. Face à ces extrêmes, Elinor s'offre comme une figure de l'équilibre grâce à son discernement dont elle ne fait pas une fin, mais un instrument pour réguler ses sentiments. Après une première partie qu'on peut trouver peut-être longuette, c'est avec subtilité et ironie que Jane Austen traite de cet alliage souhaitable et des difficultés à l'instituer.

Mansfield Jungle

The Inn at Lambton, 8 juin 2014

Avec Mansfield Park, j’ai bouclé ma découverte de l’œuvre de Jane Austen. 

En ce qui me concerne, le sentiment qui m'a dominé d'abord a été d'entrer, aux côtés de Fanny Price, recueillie à titre de parente pauvre par son oncle et sa tante nobles, dans un labyrinthe. En effet, au sein de la famille Bertram où prévaut des relations hiérarchisées (père → mère → garçons → aînés → Sultan le chat → cadets → filles, etc.) et formelles, Fanny Price doit apprendre à se faire la plus discrète possible et se soumettre aux autres sans jamais rechigner, de sorte qu'elle vit en permanence sur le qui-vive pour ne pas se voir reprocher d'oublier sa place.
    
Girl sketching (1810) – Henry Raeburn

Pour décrire l'anxiété quotidienne de Fanny Price, un vocabulaire d'animal de chasse est même employé. Il importe de souligner que la source de cette anxiété est à la fois familiale et sociale, Mansfield Park offrant de façon générale un portrait assez critique de la noblesse anglaise et de l'autocratisme qu'elle fait régner en son sein même. Ainsi Thomas Bertram, le père, apparaît-il comme une figure tutélaire distante, presque cachée, et qui, pour cela, est d'autant plus redoutée par ses enfants.  

Ce type de père souverain et impénétrable hantera plus tard les romans d'Ivy Compton-Burnett dépeignant la gentry au tournant du XXe siècle. À ce propos, j'en suis venu à me plaire à voir en Ivy Compton-Burnett une sorte d'anti Jane Austen ou plutôt une Jane Austen maléfique avec sa manière de décortiquer (pour les « purger » selon le mot de je ne sais plus qui, peut-être Iris Murdoch) les relations humaines qui gouvernaient les familles anglaises aisées, non par de longues analyses descriptives comme Jane Austen, mais par des dialogues équivoques et frustrants dans un style, tout propre à elle, qu'on pourrait qualifier de néo-gothique verbal.  

Heureusement pour Fanny Price, c'est, dira-t-on, une Ivy Compton-Burnett féerique qui se penche sur son sort puisque Jane Austen lui imagine un ami, Edmond Bertram, d'une bonté touchante à son égard lorsqu'elle est enfant. Plus grande, Fanny tombera amoureuse de cet homme aux vertus nombreuses même si elles ne le garderont pas de se laisser mystifier par la fougueuse Mary Crawford. 

Si la relation entre Edmond Bertram et Mary Crawford se révèle tout sauf idyllique, elle est marquée par d'incessants agacements et tiraillements, on se dit toutefois qu'il faudrait en définitive peu pour que les deux créatures se décident à un mauvais mariage et que Fanny Price demeure ainsi captive d'une condition dépendante. 

De façon générale, Mansfield Park n'est pas un roman où l'on voit la vertu triompher de l'injustice et des illusions. Ce sont des incidents qui changent la donne en dernier lieu. À cet égard, le père, Thomas Bertram, qui se croit le gardien sage et infaillible de sa famille, ne ressort certes pas finaud des événement 

Finalement, après avoir parcouru tous les romans de Jane Austen, j’en suis pour ma part à faire de Mansfield Park mon préféré. Il partage la beauté de Persuasion et l'humour de Northanger Abbey. Comme le premier, il offre aussi pour intérêt de ne pas voir Jane Austen se cantonner à la seule peinture de cercles familiaux. D'une grande (et somme toute triste) vérité sur les relations humaines et sociales, Mansfield Park comporte des épisodes remarquables (la pièce de théâtre, l’excursion chez les Rushworth, le séjour de Fanny à Portsmouth, etc.) qui en font assurément un roman ambitieux maîtrisé.