Et son ombre recueille une sélection de textes sur les sœurs Brontë ainsi que sur quelques autres auteurs britanniques. Pratiquement tous proviennent du forum The Inn at Lambton. On peut considérer Et son ombre comme complémentaire au Wanderer of the Moors (site dédié entièrement aux sœurs Brontë) et à Passerelle (sur la littérature britannique en général). Par ailleurs, je tiens à m'excuser de la qualité pas toujours bonne des photographies que je propose de mes voyages en Angleterre, notamment dans le Yorkshire d’où étaient originaires les sœurs Brontë.

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The Left Bank de Jean Rhys

The Inn at Lambton, 9 mars 2022

J’ai relu The Left Bank (Rive gauche), recueil de nouvelles qui a constitué la première publication de Jean Rhys en 1927 (alors qu’elle avait 37 ans). Celle-ci y fait revivre ces années parisiennes pour offrir des scènes et des portraits divers, mais surtout évoquer la pauvreté et la solitude qu’elle y a connu.

L’ironie domine d’abord comme au sujet de l’envahissement de Montparnasse par les Britanniques et les Américains : 

“For they are very intelligent, all these people. They paint, they write, they express themselves in innumerable ways. It is Chelsea, London, with a large dash of Greenwich Village, New York, to liven it, and a slight sprinkling of Moscow, Christiania and even of Paris to give incongruous local colourings.” (Tout Montparnasse and a Lady)

Ce ton, Jean Rhys l’aura aussi pour traiter de son triste sort :

“For it was her deplorable habit, when she felt very blue indeed, to proceed slowly up the right-hand side of the Boulevard, taking a fine à l’eau – that is to say a brandy and soda – at every second café she passed.” (In the rue de l’arrivée)

Et encore plus loin dans la même nouvelle,  quand Jean Rhys se décrit d’une façon qui est typique dans son œuvre  :

“Miss Dufreyne, for such was the Lady’s name, was a weak, sentimental, very lazy, entirely harmless creature, pathetically incapable of lies or intrigue or even of self-defence – till it was too late. She was also sensual, curious, reckless, and had all her life roused a strong curiosity in men. So much for her.”

Toutefois, l’expression intime et poignante de la détresse prendra de plus en plus le pas, notamment dans Hunger (le titre dit tout de ce que l’auteur a dû subir au cours de sa vie) ou dans Vienne, le dernier texte et de loin le plus long du recueil :

“Not to be poor again. No and No and No. ...And every second-rate fool can have their cheap little triumph over you… C’est rien – c’est une femme qui se noie !… How lonely I am – how lonely I am. Tears.”

Pauvre Jean Rhys… Un crève le cœur.

Il y aurait beaucoup à dire sur les 120 pages de The Left Bank, mais une chose m’y semble spéciale, comme mes extraits précédents le laissent suggérer, c’est l’emploi que Jean Rhys fait du français jusqu’à l’hybridation avec l’anglais. Il faudrait hélas citer de longs extraits pour bien faire ressortir l’impression de créole – à mon avis recherchée par Jean Rhys qui venait des Antilles – que l’on peut éprouver.

Enfin, avec The Left Bank, on pensera à une autre authoress dont beaucoup de nouvelles se passent à la même époque à Paris : Katherine Mansfield. Je dois avouer que c’est seulement hier que je me suis avisé qu’elle et Jean Rhys n’avaient que deux années de différence (1888 pour Katherine Mansfield, 1890 pour Jean Rhys, toutes deux enfants des îles). Par contre, pas moins que 56 ans séparent leur mort (1923 pour Katherine Mansfield, 1979 pour Jean Rhys). 56 ans ! Cela m’a donné le tournis d’une vie si courte pour l’une, de souffrances si longues pour l’autre…

 Jean Rhys : The Left Bank, 1927.